Outa : A la poursuite d’un coquillage

outa
Shade Of Darkness


Déconnecté
 Message
Posts : 32
Threads : 1
Il y a 3 ans | Le 05 Aug 2020 13:06:08
------------------------ chapitre 15 ------------------------
Nous marchons les jours suivants sans encombre. En effet, Aloïs connaît bien les coins peu risqués car elle a parcouru ce trajet de nombreuses fois. Et puis apparemment, c’est loin d’être l’endroit le plus dangereux de ces terres. 

La route est vallonnée et fatigante, nous parlons donc peu. La veille, nous sommes passées par un marché et j’ai vidé un peu ma bourse pour me racheter une belle cape. La vieille vendeuse me l’a décrite comme “résistante“. Je verrai à l’usage si elle a raison ! Actuellement, je suis surtout contente de l’avoir car elle me sert de couverture pendant les nuits les plus fraîches. 

Je regarde un peu aux alentours, j’aime contempler le paysage pendant notre marche silencieuse. Autour de moi, le panorama se transforme. Parfois ce sont des plaines d’herbes tendre, parfois de hautes montagnes ou encore de denses forêts. 

Nous nous arrêtons souvent le long de rivières. C’est un endroit où nous trouvons toujours des poissons pour nous nourrir et où nous pouvons nous laver. Aloïs me prend sous son aile et m’apprend à pêcher. Elle me montre comment tailler des roseaux en pointe pour attraper des poissons.“ Si tu sais pêcher tu n’auras plus jamais faim ! “, me répète-t-elle souvent. Je mangerais plus volontiers du poulet ou du mouton, mais je serais ingrate de refuser de la viande grillée, quelle qu’elle soit.

Avec Aloïs, je me sens en sécurité. J’imagine que son épée et sa maîtrise du combat y sont pour beaucoup ! Malgré son énergie, c’est quelqu’un d’extrêmement apaisant. Je lui pose peu de questions sur mon père. J’ai le sentiment qu’elle m’a dit le plus important à l’auberge et qu’elle garde le reste, comme un secret qui ne me regarde pas. Donc je n’insiste pas. 

J’essaye de rester positive mais je ne peux m’empêcher de sentir mon corps fatiguer. Je trébuche plus souvent contre les aspérités des chemins, j’ai davantage de mal à ouvrir les yeux le matin et mon dos me fait maintenant mal sans arrêt. Dormant à même le sol et passant la journée debout, il est compliqué de le préserver. 

Et puis un soir, nous nous couchons ensemble dans l’herbe, non loin d’un feu dont les braises fument encore. Nous regardons les étoiles et apprécions le calme de la nuit. La brise légère dans les fleurs. Le son de lointains grillons. Le bruissement d’un cours d’eau, non loin de là. Et puis soudain, Aloïs brise le silence pour me dire : 

- “ Demain, nous arriverons à notre destination “ 

Je ne peux m’empêcher de sourire à l’annonce de cette nouvelle. Je ne sais pas où nous allons, mais l’idée qu’on y soit bientôt me remplit d’aise. Je m’endors, sereine.
 

outa
Shade Of Darkness


Déconnecté
 Message
Posts : 32
Threads : 1
Il y a 3 ans | Le 12 Aug 2020 12:00:43
------------------------ chapitre 16 ------------------------

Le lendemain, je me lève d’un bond. En 3 minutes, je me suis rafraîchi le visage, j’ai jeté de la terre sur le feu et j’ai le sac sur le dos, prête à partir !
Aloïs qui est seulement en train de s’étirer réfrène mes ardeurs en riant. Elle m’explique que nous n’arriverons pas là-bas avant ce soir. 
- “ Raison de plus pour partir sans tarder ! “, lui répondis-je de bonne humeur. 

J’attends que ma compagne de route finisse de se préparer, impatiente. J’ai le sentiment d’avoir autant d’énergie qu’une fillette de 5 ans, tenir en place est devenu difficile. 

Quand nous partons enfin, je démarre comme une flèche. Je ne sais pas qui est cette personne, mais qu’elle se prépare, j’arrive ! 

La journée passe relativement vite et c’est une fois que le soleil commence à se coucher qu’Aloïs me signifie qu’on est très près d’arriver. Elle ajoute : 
- “ Très chère Outa, ne soit pas trop étonnée par la personne que nous allons rencontrer, elle est … surprenante ! “ 

Je ne me formalise pas car, après les rencontres que j’ai faites, j’ai le sentiment que plus rien ne peut m’étonner !

Nous arrivons devant la face abrupte d’une montagne sur laquelle se trouve, accolée, la façade d’une maison. Elle semble normale et pittoresque, sauf qu’il n’en est rien. En effet, tout est énorme. Rien qu’une fenêtre doit faire 5 fois ma taille. Je me sens absolument minuscule. Je n’ai jamais vu une habitation aussi grande. Je resterais bien pour continuer d’admirer cette architecture, mais voilà qu’Aloïs frappe à la porte. Une voix grogne de l’intérieur :
- “ Entrez ! C’est ouvert ! “ 

Je ne vois pas comment Aloïs pourrait pousser une porte aussi grande, peu importe sa force ! Cette dernière me regarde en souriant et puis se dirige vers une entrée plus petite, découpée dans la grande. Je ne m’y attendais pas à celle là ! Elle rentre en premier, je la suis… Et me trouve soudain pétrifiée ! 
Plusieurs mètres d’écailles bleues, de griffes et de crocs se dressent devant moi ! 
 - “Aloïs ! Un DRAGON !! “

outa
Shade Of Darkness


Déconnecté
 Message
Posts : 32
Threads : 1
Il y a 3 ans | Le 19 Aug 2020 17:08:34
------------------------ chapitre 17 ------------------------

Après quelques secondes bloquée face à cette vision d’horreur, je cours me cacher derrière le premier objet volumineux que je trouve ! Je regarde, apeurée, mon amie qui n’a toujours pas bougé. Et puis je tourne mes yeux vers le dragon… qui m’observe. Quand soudain, elle éclate de rire ! Aloïs se joint à elle de bon coeur. Je suis la seule à trouver cette situation absolument absurde ? 
Après quelques instant, où je les vois se tordre de rire, le dragon s’essuie une larme du coin de l’oeil et puis prend la parole : 
- “ AAahh, merci Aloïs ! Voilà bien longtemps que je n’avais plus autant ri ! 
Allez, suis moi. Tu veux boire quelque chose ? “ 
- “ Avec grand plaisir, Irma ”, lui répond-elle. - “ Je prendrai ce que tu pourras m’offrir ! “ 
- “ Ce sera comme d’habitude, alors ! Une bière de ma fabrication coupée à l’eau “. Et, sans me regarder, elle ajoute : “ Tu nous rejoins quand tu te sens prête, Outa. “ 
Je vois Irma attraper un tout petit verre du bout de ses griffes et le plonger, dans un chaudron de bière. Je profite qu’elle soit dos à moi pour venir m’installer à côté d’Aloïs sur un banc prévu à cet effet. Les deux compères continuent leur discussion comme si je n’étais pas là.
[09:57]
- “Je vous attendais hier Aloïs, que s’est-il passé ? “, commence le dragon en prenant une gorgée dans un verre à sa taille. 
- “ J’aurais bien voulu, mais la jeunette n’est pas une rapide ! “ 

Le dragon tourne sa tête vers moi pour me parler, ce qui me fait frissonner. 
- “ Jeunette… Pas tant que ça il semblerait ! Tu dois avoir autour de 25 ans non ? “ 
- “ 26 ans, en effet “, lui dis-je d’une petite voix
- “ Et bien tu vois Aloïs ! Pour une humaine c’est déjà pas mal ! Moi qui pensait que tu allais me ramener une adolescente ! “ 

Elles rient à nouveau toute les deux. J’en profite pour regarder Irma. Elle est à la fois effrayante et d’une beauté hypnotisante. Le genre qu’on ne perçoit pas au premier abord. Ses écailles sont bleu foncé, irisées sur la plupart de son corps et beige au niveau de son ventre. Elle est pourvue d’ailes faisant sa taille et qu’elle doit garder contre elle pour ne pas tout renverser. Ces dernières sont bleu et argentée. Sa silhouette se termine par une longue queue pourvue de pointe à son extrémitée. En y regardant mieux, elle semble d’une grande gentillesse. Je peux voir des rides se former au coin des yeux quand elle … sourit ? Un sourire de dragon est forcément un peu effrayant mais je perçois quand même la joie sur son visage. J’ai du mal à détacher mon regard de sa personne… À la fois monstre et humaine.
[09:59]
- “ Bon, un peu de sérieux! Vous devez avoir faim vu que vous n’avez pas encore mangé  !”
- “ En effet “, répond Aloïs. 
- “ J’ai bien fait de demander à Joseph de vous prendre du pain et du pâté ! Vous devez en avoir marre du poisson !“ 
- “ Aaahh mais comment va ce vieux bougre ?! “, lui demande mon amie. 

Je regarde, un peu déconcertée, les deux camarades se donner mutuellement de leurs nouvelles. L’ambiance est très conviviale mais j’ai le sentiment de tenir la chandelle… 

Pendant que nous mangeons, je reste silencieuse. Elles ont apparemment du temps à rattraper. Au cours de leur échange, j’apprends que Joseph est un ami d’Irma qui lui rend régulièrement service. Ici, par exemple, il est allé faire ses courses dans un marché où elle ne pouvait pas rentrer dû à sa taille… entre autres choses. Après quelques verres et sans que je lui ai rien demandé, Irma entreprend de m’expliquer un peu de son histoire :
- “ Et bien Outa, j’étais comme toi avant ! Je n’étais plus toute jeune mais j’étais comme toi ! Une femme ! Avec de vrais jambes ! “ Son visage s'assombrit. “ Ce sont les Terres d’Argent qui m’ont transformée… Il y a très longtemps, j’étais une mage en quête de pouvoir. J’en voulais toujours plus. Je voulais être invincible ! Et c’est le pouvoir qui a pris possession de moi… “
 
Aloïs, pour détendre l’atmosphère, ajoute dans un éclat de rire : 
- “ En tout cas Outa, ne t’avise pas de partager une bière avec un autre dragon sur ces terres. Ils sont rarement aussi accueillant ! “ 

C’était la phrase qu’il fallait pour qu’elles soient hilares à nouveau ! 
Je les regarde à tour de rôle… Mais qu’est ce que je fiche là !

outa
Shade Of Darkness


Déconnecté
 Message
Posts : 32
Threads : 1
Il y a 3 ans | Le 26 Aug 2020 17:25:49
------------------------ chapitre 18 ------------------------

Je ne suis vraiment pas à l’aise dans cet environnement. Je profite donc d’un petit moment d'inattention de leur part pour m'éclipser et visiter un peu le lieu. De toute façon, les questions importantes ne se poseront pas aujourd’hui. Je marche de salle en salle, dans ce lieu mi-maison, mi grotte. Tout est énorme et j’ai un peu de mal à me retrouver dans l’espace. À un moment, j’arrive dans une salle dont la seule utilité est … de détenir un trésor ! Je pensais que ce n’était qu’une légende ! Je m’approche de ce monceau d’or et de bijoux. Je sens mon instinct de voleuse se réveiller, surtout ce soir où j’ai le sentiment d’être perdue et invisible. 

Mon cerveau s'éteint. J’ai arrêté de réfléchir. Mon coeur se met à battre plus fort et mon bras se tend vers une magnifique pièce en or. Il y en a des milliers mais c’est celle-là que j’ai instinctivement choisie. Elle semble neuve tellement elle brille. Et il y a gravé, sur ses faces, des oiseaux. Je glisse rapidement la pièce dans ma poche et quitte cet endroit. C’est à ce moment là que je me remets à penser… Mais je suis complètement stupide ! Je suis dans la maison d’un dragon qui m’invite et me nourrit et qui va, peut-être, m’aider à trouver mon père. Et moi, je ne trouve rien de mieux à faire que de la voler !

- “ Outa ! Viens nous rejoindre ! “ 
J’entends cet appel lointain venant de l’autre bout de la maison. C’est Irma qui parle, je ne pense pas que j’aurais entendu Aloïs d’aussi loin. Je presse le pas pour retourner dans la pièce de vie. Malgré ma marche rapide, j’ai l’impression que je met un temps fou pour les rejoindre. 

Une fois face à Irma, je remarque que son air a changé. Elle me fixe, les yeux un peu plissés. Avant que j’ai pu dire quoi que ce soit, elle me met devant le visage la pièce en or qu’elle tient entre les griffes. Par réflexe, je vais vers ma poche pour vérifier qu’elle s’y trouve encore mais… Elle n’y est plus ! Comment c’est possible ?! Je ne peux m’empêcher de regarder la dragonne avec peur et admiration. Elle prend la parole, l’air un peu las. Elle a tellement bu qu’elle a du mal à me regarder droit dans les yeux. 

- “ Très chère Outa, réfrène tes ardeurs dans ma maison veux-tu?“ 

Je suis crispée, je ne sais pas quoi répondre. Je lance un regard vers Aloïs. Elle a les sourcils froncés, visiblement en colère.

Quelques secondes de silence passent pendant lesquelle aucune de nous ne bouge… Jusqu’à ce qu’elles se remettent à rire de bon coeur ! Je ne peux m’empêcher de les rejoindre, le stress du moment s’évacuant. 

Peu de temps plus tard, j’ai été me coucher sur un matelas à même le sol, pour dormir de tout mon saoul, avec Aloïs

outa
Shade Of Darkness


Déconnecté
 Message
Posts : 32
Threads : 1
Il y a 3 ans | Le 16 Sep 2020 23:15:35
------------------------ chapitre 19 ------------------------

C’est le matin et j’ai du mal à ouvrir les yeux. Je ne sais pas combien de temps j’ai dormi mais je sens que j’en avais bien besoin. 

Les deux amies sont déjà dans la salle commune et parlent calmement. J’imagine qu’elles ne veulent pas me réveiller. Je m’assieds sur le bord du matelas et m’étire longuement. Je démêle rapidement mes cheveux ondulés avec mes doigts et puis en forme une tresse. Je repense à cette pièce de la veille. Je suis un peu déçue de ne pas avoir pu l’ajouter au reste de mes trésors … tant pis. 

Après m’être habillée et avoir enfilé mes bottes, je peux rejoindre les autres et manger un morceau. Quand Irma me voit arriver elle s'exclame : 
- “ Aaaahhh La belle au bois dormant revient parmi nous ! “
 
Je ne peux m’empêcher de sourire. Je la trouve drôle et accueillante, je ne m’attendais pas à ça pour un dragon ! Je m’étonne de les voir toutes deux réveillées et en forme vue la quantité d’alcool qu’elles ont consommé hier soir ! 
- “ Viens t’asseoir, Outa. Quand tu auras mangé, nous pourrons parler de la raison de ta venue “, ajoute-t-elle.

Une tasse de café bien chaude m’attendait déjà à ma place, ainsi qu’une planche avec de quoi me faire un bon petit déjeuner. Une fois ma tartine avalée, nous changeons de pièce pour nous installer dans un endroit plus confortable. Irma est sur un très grand fauteuil à sa taille tandis que nous, nous sommes chacune sur un grand coussin face à elle. La dragonne prend la parole, plus solennelle qu'à son habitude : 
- “ Comme tu as pu t’en apercevoir Outa, j’ai une certaine capacité à voir dans l’avenir. À découvrir ce qui est caché. C’est la raison pour laquelle Aloïs t’as amené jusqu'à moi. Je pense pouvoir t’aider à avancer dans ta quête, à trouver ton père.”

Je comprends un peu mieux toute ces certitudes qu’Irma semblait sortir de nulle part. Toutes ces questions qu’elle n’a pas eu besoin de poser.. Ces repas prêts juste avant qu’on n’arrive, l’attente de notre venue…
Je n’ai même pas besoin de parler pour lui expliquer ce que je cherche et je trouve ça très appréciable. Raconter encore et encore la même histoire est chaque fois un peu plus douloureux. 

- “ Donne moi cette broche s’il te plait”, me demande-t-elle.
 
Je décroche le bijou de mon corset et le pose dans le creux de sa très grande patte. Il a l’air minuscule. Elle referme ses griffes autour de lui et entoure le reste de sa deuxième main, avant de ramener le tout contre son coeur. Elle ferme les yeux quelques secondes. Quand elle le rouvres, ils sont blanc. 
L'atmosphère change; la lumière baisse légèrement, le bruit environnant disparaît. Il y a une sorte d'électricité dans l’air. Irma s’entoure d’une faible aura de lumière. Je ne peux m’empêcher de frissonner à cause de l’ambiance mystique qui s’est installée. Je n’entends plus rien, le silence est lourd.(modifié)

Soudain, la voix inconnue d’une femme s’élève. Elle semble sortir du ventre de la dragonne, qui reste totalement immobile. 

Il faudra changer d’yeux, 
Ne plus suivre le même bleu.
Le fruit d’un ovule séparer 
Il te faut pourchasser.
Ton guide sera le feu 
De son âme, de ses cheveux.

Il y a de nombreuses lunes 
Naissait aussi une fleur,
Il est offert à chacune 
De ne plus vivre dans la peur.

Immédiatement après le dernier mot, l’ambiance étrange disparaît. La lumière et les sons reviennent, l’atmosphère redevient chaleureuse. Les yeux d’Irma retrouvent leur couleur. Et moi, je reste figée, sous le choc.

outa
Shade Of Darkness


Déconnecté
 Message
Posts : 32
Threads : 1
Il y a 3 ans | Le 25 Sep 2020 09:50:15
------------------------ chapitre 20 ------------------------

Immobile, le regard vague, je n’entends que des bourdonnements dans mes oreilles. À cet instant précis, je ne suis plus vraiment là… 

Des formes floues sont en mouvement devant mes yeux. Elles m’obligent à reprendre un peu contact avec la réalité. 

- “ Outa ? Outa? Est-ce que tu vas bien ? “ 

Je tourne la tête et je vois qu’Aloïs et Irma me regardent l’air inquiète. 
- “ C’est bon ! Elle est revenue parmi nous ! Je vais lui faire chauffer une infusion” dit Irma.

Elle se dirige ensuite vers la cuisine. Je ne bouge pas. Aloïs me parle mais je ne distingue pas vraiment ses mots. Elle glisse un papier dans ma main. Je le sens mais je ne le regarde pas. Je fronce légèrement les sourcils quand elle me prend le bras pour me forcer à me relever. Je me laisse faire. J’avance comme une automate jusqu’au banc dans la pièce de vie, dirigée par mon amie. 

Irma dépose face à moi une tasse fumante d’une infusion que je ne reconnais pas. L’odeur est piquante et désagréable. 


- “ Je l’ai préparée il y a quelques jours, mais je ne savais pas encore pourquoi. Ça devrait t’aider à te calmer. “ 

Je prends la tasse dans mes mains, le contact de la chaleur est presque brutal. Je la ramène jusqu’à ma bouche et en prends une gorgée. Le goût est atroce et je ne peux m’empêcher de grimacer. 
- “ Allez Outa, prends en au moins une autre ! “, me dit Irma. 

Je me force à prendre encore un peu du breuvage et puis repose la tasse. 
Le regard toujours dans le vague, j’ai l’impression que je sens de moins en moins mes extrémitées. Une douce chaleur m’envahit. Mon corp devient coton. Les couleurs se mélangent, les sons se transforment en musique. Mes pensées ne sont plus là, juste mes sensations. Je regarde mes mains, lâchant le papier qu’Aloïs m’a donné. Puis je ferme mes yeux et me laisse aller, dans le vide.

Je flotte, hors de mon corp. Des cheveux s’entremêlent. Je vole. Coquillage bleu, yeux salé. Immergée dans le lait, les larmes, le sang. Un trou béant de colère. Revenue foetus. Accolés, serrés, expulsés. L’air est coupant comme une lame. Les pleurs, chant de la vie. Les cris se mêlent, comme les doigts. Le reflet du miroir qui hurle, qui hurle, qui hurle ! J’étouffe, mon double dans la gorge. J’étouffe. 

Je me réveille en sursaut, dans le lit, en sueur. 

J’ai une soeur jumelle…

outa
Shade Of Darkness


Déconnecté
 Message
Posts : 32
Threads : 1
Il y a 3 ans | Le 04 Oct 2020 11:10:30
------------------------ chapitre 21 ------------------------
Sous la couverture, les jambes repliées sous mon menton, je laisse les pensées revenir, à leur rythme. J’ai le cerveau bloqué par l’annonce qui m’a été faite. 

Il faut que je bouge ! En sortant du lit, je remarque un papier laissé à côté de celui-ci : “ Nous revenons dans deux jours. Tu as tout ce qu’il te faut pour manger dans la cuisine. Irma s’excuse, elle a un peu trop chargé l’infusion. Nous espérons que tu vas bien ! À bientôt, Aloïs  “ 

Je repose le mot sur le lit et marche dans la pièce. Elle semble différente. Ou peut-être est-ce moi ? Une boule est apparue dans ma gorge et dans mon ventre. Je mets mes bottes et me dirige vers mon sac à dos. J’y trouve, déposé sur le dessus, une petite enveloppe. À l’intérieur, la prédiction révélée par Irma la veille. Je n’arrive même pas à la lire. Je la range dans ma boite. 

En allant dans la cuisine, je trouve le crayon ayant servi à Aloïs pour m’écrire un peu plus tôt. Je rajoute à la suite de ses lignes “ Merci” Et “désolé ” puis laisse le tout sur la table. Une fois mon sac sur le dos, je quitte ce lieu, sans me retourner, sans y penser.

Je marche, je ne sens pas le vent, je ne regarde pas le paysage, je ne perçois pas la lumière ou l’heure qu’il est, je n’entends pas les oiseaux. Je marche. Sans suivre la route, sans faire attention, j’avance. 

J’ai une soeur jumelle 

Marcher ne me suffit plus, maintenant je cours. J’ai l’impression que je n’irais jamais assez loin, jamais assez vite, pour échapper à cette réalité. 
Je veux que mes émotions restent détachée de mon corps, je veux les laisser derrière moi, dans cette maison étrange. J’ai l’impression que si je m’arrête, je vais mourir. 

Je vais toujours plus vite mais elles me rattrapent. Ces pensées atroces, qui grignotent ma raison et mon coeur. Je ne veux pas y faire face, je ne veux pas, ce sera trop dure ! Et là, c’est la rupture… 

J’ai une soeur jumelle… 

La douleur que cette idée me procure me prend jusqu’aux os et je m’effondre malgré moi sur le sol. Je voudrais me détacher de mon corps, arrêter de ressentir. Je me sens … je n’ai pas les mots. J’ai mal, tellement mal…
En position foetale, la tête dans mes bras, je pleure. Et j’ai le sentiment que je ne m’arrêterais jamais.

outa
Shade Of Darkness


Déconnecté
 Message
Posts : 32
Threads : 1
Il y a 3 ans | Le 11 Oct 2020 12:03:40
------------------------ chapitre 22 ------------------------
Je suis à bout de force d’avoir versé tant de larmes. Mes yeux sont secs. La vie semble avoir perdu ses couleurs. Je me sens vide, morte à l’intérieur. 

Je me relève avec difficulté. Et me remets à marcher, lentement. Je ne sais pas où je vais. Je ne sais pas pourquoi je suis encore debout. Je n’attends plus rien. De temps en temps, une pensée terrible m’assaille. “ C’est elle qu’il a choisi“. Je secoue la tête, essayant avec difficulté de la chasser de mon esprit. J’ai déjà trop pleuré. 

Le temps est assorti à mon humeur. Il fait gris. Après quelques heures de marche, le soleil commence à se coucher et je sens une première goutte de pluie. Pour l’instant, je ne m’arrête pas. Je n’y arrive pas. La dernière fois que j’ai arrêté de marcher … je ne veux pas vivre ça à nouveau. Il pleut de plus en plus fort. La nuit tombe, l’obscurité devient opaque. Je continue ma route, sans objectif. Mon corps m’appelle, je sens que j’ai faim, que je suis physiquement fatiguée. Mais je m’en fiche. C’est comme si j’étais hors de moi et que je m’observais de l’extérieur. 

Pas de lune et d’étoiles à cause des nuages. Les arbres de la forêt où je me trouve cachent les maigres possibilités de lumière que je pourrais rencontrer. 
Je suis dans le noir le plus total, je n’entends que les feuilles qui craquent sous mes pieds. Je me sens profondément seule… 

À bout de force, je me laisse tomber sur le sol. Le dos posé contre un arbre, les yeux fermés, j’essaie de me concentrer sur la douleur que me procurent mes jambes fatiguées pour éviter de penser. Je préfère vivre dans le déni de ce qui m’arrive. Je sens mon cœur se durcir… C’est sûr, je ne vais plus jamais sourire.

Un bruit se fait entendre à ma gauche. Je ne respire plus, j’écoute. Il me semble entendre des pas lourds non loin. Une silhouette se découpe dans les arbres à une dizaine de mètres. Elle est beaucoup plus grande que moi ! Elle se rapproche. Je commence à entendre des halètements mêlés à des grognements. Mon instinct de survie prend le dessus, je me lève d’un bon et me mets à courir à tout allure ! Je suis obligée de mettre mes bras devant moi pour ne pas me prendre de branches dans la figure. La terre, détrempée par la pluie, me fait glisser constamment. Un grand rugissement furieux résonne dans la nuit. J’entends les pas qui se rapprochent de plus en plus. Je vais aussi vite que je peux ! Les gouttes et le vent semblent me couper le visage, les fines branches me lacèrent les bras. Et puis, sans prévenir, je trébuche et tombe en avant. Le sol se dérobe sous mon poids, je me sens basculer dans le vide et puis m’écraser lourdement, la tête sur une pierre. Je perds connaissance.

outa
Shade Of Darkness


Déconnecté
 Message
Posts : 32
Threads : 1
Il y a 3 ans | Le 18 Oct 2020 19:52:34
------------------------ chapitre 23 ------------------------

Je me réveille avec une intense douleur à la tête. J’ouvre lentement les yeux et aperçois un soleil passer entre les branches, très loin au-dessus de moi. Donc il fait jour. Je me redresse pour m’asseoir en m’aidant de mes bras, ma tête tourne un peu. Je passe une main sur mon front et sens que c’est un peu humide… Merde, je saigne. 

Je me rends compte que je suis tombée dans un trou. Sûrement creusé par l’homme. En me mettant debout, je dois bien me rendre à l’évidence, je vais rester coincée là… 
Heureusement je n’ai rien de cassé, les feuilles camouflant le piège ont atténué ma chute. 

Je me mets douloureusement debout et j’analyse un peu mes blessures. Mes bras sont couverts de griffures plus ou moins profondes. Mon visage est lacéré de petites coupures et j’ai une grosse entaille sur l’avant de la tête. En dehors de ça, beaucoup de terre et de boue. 

Mais comment vais-je faire pour sortir de là ?

En me rasseyant, je sens que la faim est bien présente. Mais autour de moi rien à manger. Je ne sais plus vraiment depuis combien de temps j’ai quitté cette maison. Je ne sais pas depuis combien de temps je suis dans ce trou. Je n’ai que ce creux dans l’estomac… 

Un bruit ! Je tends l’oreille… J’ai peur de me retrouver à nouveau face à ce monstre qui m’a poursuivi hier. Je me recule rapidement dans l’ombre et cache ma tête dans mes bras, me faisant la plus discrète possible. 

- “ Heu… Madame ? Hé ho madame ! “ 

Je relève ma tête et vois un homme barbus, grand et avec de large épaules. Il se tient debout sur le bord du trou, les mains sur les hanches et il me regarde. Il fronce ensuite les sourcils et me lance une corde qu’il avait posé par terre à côté de lui. Je me relève, l’attrape et grimpe sur la paroi avec difficulté. Cette dernière est un peu boueuse et je me retrouve encore plus sale à l’arrivée. L’homme me tend sa main et me hisse sur le dernier mètre. 
- “ Je m’attendais à capturer un troll des plaines ha ha ! “, me dit-il en riant. “ Je m’appelle Drarsus, enchanté ! “ 
- “ Outa. Merci beaucoup de m’avoir sortie de là.  “

mon ventre se met soudain à gargouiller avec insistance. Après une seconde de silence, Drarsus s’esclaffe à nouveau. C’est un rire franc et fort, très communicatif. Je ne peux m’empêcher de sourire, un peu embêtée. Il m’invite à le suivre jusqu’à un campement avec un feu et une petite cabane en bois.  Et dire que c’était à peine à une quinzaine de mètres de l’endroit de ma chute…

Nous nous asseyons, puis il me propose du pain et du saucisson. Ce dernier a un goût divin. Je ferme les yeux pour mieux sentir ses arômes de lard un peu fumé. Après notre repas, il m’amène une bassine d’eau et un linge propre pour nettoyer mes blessures ainsi que la boue qui me recouvre. Sa présence est bienveillante et chaleureuse. 

- “ Alors Outa, où alliez-vous avant de tomber dans mon piège ? ”, me demande-t-il, souriant. 
- “ Et bien… Nulle part en réalité. Je n’ai pas d’objectif particulier “ 

Cette pensée me serre le coeur. Les souvenirs des évènements des jours précédents me reviennent comme des flashs. Je me force à ne pas y penser, même si ça m’est difficile. Drarsus a dû sentir que j’étais désemparée car il se reprend directement : 
- “ Après notre repas, j’irai en direction de la prochaine ville. Tu pourrais m’accompagner ! “

Je ne sais pas où aller, mais je suis sûre qu’errer dans cette forêt n’est pas la meilleure des idées. Je lui réponds donc par la positive. Après avoir rangé nos affaires, nous nous mettons en marche. Cet homme a la conversation plus facile qu’Aloïs. De mon côté, je ne suis pas d’humeur à parler. Néanmoins, sa convivialité me réchauffe le coeur. J’apprends que c’est un guerrier appartenant à un grand clan. 
- “ Pourrais-tu m’expliquer ce qu’est “un clan” Drarsus ? “ 

Il m’explique alors que c’est un ensemble de rencontres. Des gens qui se retrouvent autour d’un idéal, d’une philosophie commune. Le tout dirigé par un chef, qui crée l’esprit et la cohésion du groupe. Ils sont là les uns pour les autres. Quand il me parle de sa guilde, je sens sa fierté d’en faire partie. et il ajoute 
- “ Tu pourrais nous rejoindre, si le coeur t’en dit ! “ 

Je suis touchée par cette proposition et ne sais que répondre.
- “ Et bien… Je vais y réfléchir. “

outa
Shade Of Darkness


Déconnecté
 Message
Posts : 32
Threads : 1
Il y a 3 ans | Le 25 Oct 2020 13:02:49
------------------------ chapitre 24 ------------------------

Nous marcherons ainsi ensemble pendant 4 jours. Arrivés à l’entrée de la ville, Drarsus se tourne vers moi et me dit :
- “ Nous voilà à Lodaran ! Si tu te décides à entrer dans notre clan, Outa, sache qu’il sera facile de me croiser à nouveau. Tu n’auras qu'à m’attendre dans l’auberge de la ville ! À bientôt ! “ 
Nous nous souhaitons mutuellement bonne route et il reprend sa marche.

Je reste debout au milieu d’une place de marché, sous le soleil. Seule. Il y a beaucoup de monde qui circule autour de moi. Et maintenant ? Je me retrouve à nouveau isolée avec mon sac à dos pour compagnie. Je me trouve un coin un peu à l’ombre pour observer la foule. Il y a beaucoup d’agitation. De nombreuses petites échoppes et vendeurs ambulants. D’un coup, je me lève et me mêle à la foule. Je virevolte entre les gens d’un pas léger, presque dansant. D’une main habile, j’arrive à attraper quelques objets de valeur. Une bourse avec quelques pièces, deux colliers et un anneau en or. Une fois mes méfaits accomplis, je retourne à l’ombre et contemple mon butin. Je fronce les sourcils. Jusque là, je n’avais pas éprouvé le besoin de voler pour l’argent. Et je me rends compte que ça ne me procure aucune satisfaction. 

“ Et bien tant mieux ! Je ne suis plus cette fille pathétique. “, me dis-je, renfrognée. J’ai une rapide pensée pour la boite contenant mes ancien trésors … Elle appartient au passé maintenant. Je ne m’en servirais plus.

Je me relève avec pour objectif de trouver un endroit où manger. Je ne dirais pas non à un vrai repas. Après un petit moment de déambulation, je me trouve face à une façade qui ne paye pas de mine. L’intérieur semble sombre et le panneau de la devanture est à moitié effacé. Mais l’odeur qui se dégage de la porte entrebâillée est divine. Je rentre dans l’établissement et me trouve une table libre. Il y a étonnamment beaucoup de monde à l’intérieur malgré la petitesse de l’endroit. Je vais prendre une assiette de viande, de pommes de terre et de carottes. Avec en prime, une bière de sureau. J’ai l’impression que ça fait longtemps que je n’en ai pas bu. Cela me renvoi à une période, pas si lointaine, où j’étais plus sereine. 

Un homme grand et assez peu aimable vient me prendre ma commande. Je n’ai même pas le temps de m’ennuyer qu’une serveuse me ramène mon plat, directement de la cuisine. Je ne vois d’abord que son tablier. Et puis je lève mes yeux pour la regarder. Je suis frappée par sa beauté qui mêle détermination et fragilité. Je la regarde replacer quelques mèches courtes derrière son oreille avant de me souhaiter un “ bon appétit ! “ de sa voix fluette et de s’en aller en glissant de table en table, telle un papillon enjoué. 

Je mange de bon cœur, je trouve que la cuisine est excellente ici. Simple et généreuse, ça me rappelle celle de l’auberge… En cours de repas, j’entends des cris venir de la cuisine. Le serveur qui m’avait pris ma commande traverse la salle en colère, jette son tablier par terre et s’en va en hurlant “ Plus jamais ça ! ".(modifié)

Aurait-il démissionné ? Ce serait une bonne opportunité pour moi de trouver un travail. Ne sachant pas quoi faire de mes journées, ce serait une raison de me lever le matin. Une fois mon assiette finie, je me reprends une bière pour patienter. Une fois que la salle est presque vide, je retourne voir la serveuse : 
- “ Excusez-moi, je ne voudrais pas vous déranger, mais … votre collègue a démissionné, non ? Enfin, désolée si je m’avance un peu trop, mais je cherche justement un travail et j’ai un peu d’expérience dans ce domaine… “
 
Elle me regarde sans rien dire pendant quelques secondes et puis dit en faisant un geste de la main :
- “ Oh et puis pourquoi pas ! Venez, je vous amène au patron. “ 

Nous allons dans les cuisines où je rencontre un vieux monsieur. Il a l’air fatigué et me lance un regard froid qui me glace jusqu’aux os. 
- “ Papa, une femme vient de se présenter pour remplacer Siméon. Après ce qui s’est passé, je ne pense pas qu’il reviendra. “

Il me toise une seconde, retourne à son occupation et dit d’une petite voix désagréable : 
- “ C’est bon, Solen. Celle-là ou un autre de toute façon. Il nous faut quelqu’un pour demain. “

Je suis enthousiaste que l’affaire soit conclue, car ce fut étonnamment facile. Mais l’idée de travailler avec ce bonhomme ne m’enchante pas des masses. Tant pis, j’ai connu pire. 
Nous sortons de la cuisine et elle m’invite à m’asseoir à une table, puis prend la parole : 
- “ Ne faites pas trop attention à mon père, il n’a pas un caractère facile. Et comment vous appelez-vous ? “ 
- “ Oui. Pas de soucis. Outa “ 
- “ Bien Outa, je propose qu’on se tutoie, vu que nous allons travailler ensemble ! “, me dit-elle en souriant. 

Elle m’explique ensuite les quelques modalités de l’emploi, les habitudes de service et insiste énormément sur la ponctualité. 

Je prends le temps de la regarder un peu mieux. Elle a des yeux bleu-gris surmontés de sourcils volontaires, des cheveux brun dont la longueur laisse entrevoir sa nuque délicate, une expression mêlant douceur et détermination et des lèvres fines et parfaitement dessinées. 

- “ Je crois que je t’ai tout dit. Il est temps que je retourne travailler.  Alors à demain ! “ Elle se lève, me fait un signe de la main et s’en retourne en cuisine. 

Je quitte le restaurant avec dans l’idée de flâner dans les rues l’après-midi. J’espère que ma maigre expérience de serveuse sera suffisante !