-Uuuuuurgh… !

Le chatouillement provoqué par la lame venant de me transpercer le poumon me fit cracher bonne quantité de sang. Depuis près d'une heure maintenant, j'étais solidement enchaîné et subissais la colère archaïque de ce soi-disant tortionnaire de pacotille. Un jouvenceau Khuladrien aurait accompli cette tache de bien meilleure manière, je me retenais vivement de le narguer et continuais à feinter la douleur pour ne pas trahir les apparences. Je baignais littéralement dans mon propre sang, le sol en était jonché à tel point qu'on ne distinguait même plus sa couleur. L'odeur putride qui c'était installée dans la cale de l'imposant bâtiment en avait fait déguerpir plus d'un, cependant mon geôlier et bourreau lui ne baissait toujours pas les bras.


-Bordel c'est pas croyable çà t'es sacrément coriace toi !

Sa voix désagréable me chauffait sévèrement les oreilles et je commençais à perdre patience, mais je devais contrôler mes pulsions meurtrières c'était un mal nécessaire et un facteur vital au bon fonctionnement de mon plan. Maladroitement le bougre retira enfin l'une des nombreuses lances sur lesquelles j'étais empalé. Il ne s'en rendait pas compte mais mon facteur auto-guérisseur était si rapide que mes plaies se refermaient presque instantanément sur l'acier glacé, et le sang séché sur ma peau camouflait toute trace de guérison. Je me demandais combien de temps encore ce petit manège allait durer. Malgré les nombreuses lacérations et autres sévices corporelles subis il ne manquait pas d'imagination je devais bien le lui accorder. Il avait quitté la pièce et était revenu quelques minutes plus tard muni de nouveaux instruments, après réflexion je croyais qu'il c'était mit en tête de me briser les os. Une fois encore je me retenais de glousser.

[…]

Des effluves familiers vinrent me titiller les narines, je tendis l'oreille et perçus des bruits de pas dont le rythme s'accélérait au fur et à mesure qu'ils se rapprochaient. Étais-ce la fin de mon pénible supplice ? L'une des portes de la pièce s'ouvrit subitement et un contrebandier en jaillit.


-Il est là.


Par tout les dieux enfin ! Mon sang commençait à bouillir à l'intérieur de mes veines. Je n'écoutais même plus les paroles futiles de mon pitoyable tortionnaire car à présent je n'avais plus qu'une seule idée en tête, aller au bout de ma mission.

-T'as entendu l'abruti ?

Je reçus un violent coup de pied dans les côtes qui m'extirpa de mes songes laissant par la même occasion un juron s'échapper de ma bouche. « Sois en sûre, tu seras le premier à mourir » pensais-je. A peine eussè-je le temps de terminer ma phrase qu'il se saisit de mes cheveux et m'assena une série de coups de poings au visage, bégayant je ne sais quelle injure des rats de son espèce. Après une énième saccade celui-ci lâchait enfin prise, le manque de réaction de ma part avait finalement eu raison de lui et la grimace qui étirait ses traits m'indiquait que la douleur l'empêchait en fait de continuer. Je fermais les yeux et laissa ma tête tomber en avant face au sol, laissant même échapper une raillerie. Mes liens me tenaient toujours debout certes mais cette position avachi me permit de détendre mes membres quelques peu endoloris après pareil traitement. La position restait malgré tout inconfortable du fait que mon corps était encore transpercé de toute part.

De nouveaux bruits de pas et des sons de voix plus rauque et virils que les précédents se firent entendre, mon rythme cardiaque se mit alors à s'emballer et l'excitation s'emparer de mon être tout entier. Un frisson me parcouru même l'échine un instant bref, le moment tant attendu était arrivé et je ne tenais plus en place.

[…]

L'entrée fracassante du chef de cette bande vaux-rien fit sursauter les plus couards d'entres eux, pour ne pas dire tous à vrai dire. A peine entrée dans la pièce, celui-ci prit son élan et m'expédia un puissant coup de pied en plein visage qui ne manqua pas de me faire bouger de quelques centimètres.


-Alors l'étranger, il semblerait que les piques sur lesquelles tu avais prévu d'embrocher ma tête et te pavaner avec n'ont pas atterrit exactement là où tu l'avais prévu. A boire !

Ses sbires s'esclaffèrent et un l'un d'entre eux s'exécuta. Le bonhomme se rinça le gosier à grande gorgées et claqua sa flasque au sol une fois celle-ci terminée.

-Écoutes moi bien l'empaffé, car je ne me répéterais pas deux fois. Qui es tu et qui t'envoi ?

L'homme se racla la gorge et me cracha dessus, se qui déclencha l'euphorie de ses compagnons. Je pris alors le plus grand soin à lui répondre d'un ton macabre.

- Les Gulr vous saluent bien.

Les gausseries s'estompèrent presque aussi vite qu'elles n'avaient commencé. Je sentis le vent de panique s'installer dans l'esprit du nouveau venu et l'incompréhension la plus totale dans le cœur des autres.

-Sh... Shiraï ? Souffla t-il d'une voix tremblotante.

Pour la première fois depuis son arrivée théâtrale, je levai la tête fixa le bandit de mon regard de glace. Un regard qu'il connaissait parfaitement et qu'il aurait reconnu entre 1000, tout comme il avait reconnu le son de ma voix quelques instants plus tôt.

[…]


-Bouh.