J'aime la nuit, c'est calme. On entend à peine le plissement de l'herbe sous les pattes d'un chat... Tout juste le souffle d'une brise dans les arbres... La nuit avec pour seule invitée la lune qui nous berce de sa lumière...
La nuit peut rendre triste, mélancolique... Elle provoque bien des sentiments, elle apaise... Elle fait se questionner, elle peut provoquer bien des drames mais elle fait aussi naitre les plus belles histoires... Celles qui restent dans les mémoires, celle que lorsqu'on y repense parfois fait couler quelques larmes...
Moi la nuit, adossée à un arbre, sûrement centenaire, je me perds à écouter la nuit, à laisser s'envoler mon regard dans l'astre lunaire...
Qui me connait réellement, qui a cherché à voir au-delà des apparences... Peut-on simplement penser à effleurer la carapace.
Cela fait bientôt un an qu'Anna m'a ramené, une année que j'ai rencontré l'Angaerie et que je suis devenue Cheffe des Arachnéas... Les miens n'ont cessé de croitre depuis, peu importe les coups bas, ou les puissants voulant nous écraser nous nous relevons toujours plus fort...
J'ai ce vide à la place du cœur, c'est elle qui me l'a pris, c'est notre suprême qui veille dessus pour me protéger... Il ne me manque pas vraiment, mais peut-être inconsciemment je cherche à ressentir, effleurer mon âme ébréchée...
Je n'ai pas mal, ça étouffe ma peur. Je n'aime pas, je ne déteste pas... Tuer ne me procure pas vraiment de plaisir, ni de dégoût.. Il n’ y a qu'avec Anna que c'est différent, peut-être parce qu'elle est mon lien le plus précieux et depuis toujours...
Depuis cette nuit où nous avons pénétré cette caverne, nous ne l'avons pas revu, l'Angaerie. Je sais qu'elle surveille nos faits et gestes. Elle reste dans l'ombre et parfois j'ai l'impression qu'elle me contrôle, qu'elle guide ma lame, comme un tribu qu'on doit payer, ou honorer...
Je m'égare dans mes pensées qui filent comme le vent et déjà j’entends un merle chanteur qui sonne l'aurore. Je n'ai pas envie de rentrer ce soir, enfin pour cette fin de nuit... Je suis bien là, couchée dans l'herbe fraîche par cette nuit estivale... Demain sera un autre jour avec son lot de sang, et je préfère profiter de ce moment d’accalmie rien qu'à moi.
[...]
La pluie, je ne peux pas dire que j'aime lorsque l'eau tombe du ciel par brume ou par averse... Ou encore quand le tonnerre gronde et que les éclairs illuminent la nuit...
Mais la pluie a ses bienfaits. J'ai toujours pensé qu'elle lavait les âmes égarées, qu'elle enlevait le poids que parfois on peut sentir sur nos épaules... Elle cache les visages, peut dissimuler les larmes...
Dans l'antre des Arachnéas, à ma fenêtre je la regarde tomber. Je l'admire épouser parfaitement chaque parcelle de toile... Je m'amuse à prendre quelques goûtes sur mon index et regarder comment la lumière passe au travers... La pluie est mélancolique, ou peut-être que c'est moi qui le suis allez savoir...
Ces mois d’insouciances depuis mon retour, ses aventures plus folles les unes que les autres... Les fêtes jusqu'au petit matin avec mes araignées... Je grandis et les miens m'accompagnent... j'ai décidé de m'amuser comme je l'entendais, tenter de ressentir quelque chose enfin... J'ai cru le trouver par moment mais cela ne dure jamais, quelque chose cloche chez moi et je sais que cela vient de ce qu'il me manque...
La pluie nous nourrit, l'eau fait grandir chacun des arbres de la forêt protectrice qui nous entoure, fait pousser ces fleurs si particulières... Je n'ai pas envie de rester enfermer, alors je prends quelques affaires, ma dague et mon fouet et je sors chasser sous la pluie... Un léviathan, une chimère ou même un crocodile peu importe ce que je trouve cela fera toujours de la bonne viande à griller pour les Arachnéas... [...]
L'aube, l'aurore peut importe comment on l'appelle elle fait naitre des sourires sur mon visage, les rayons du soleil après une nuit de pluie, m'éveille en caressant délicatement ma peau... C'est mon petit moment de douceur dans ce monde, cet instant ou tout est parfait... Ses couleurs pâles faite de rose et d'or traverse le ciel qui peu à peu s’éclaircit...
L'aube nous permet de peser l'avenir, de le voir sous un jour nouveau... Elle me rappel que les belles paroles et promesses d'anciens amis n’était que poussière au vent... Elle nous prépare aux nouveau ennemis qui se dresse et nous rempli d'espoir face à l'adversité...
L'aurore me donne du courage, entourée des miens elle me porte au delà de tout se qui est possible... Elle fait battre mon cœur qui n'est plus la et me fait croire en cet avenir juste et droit même si en regardant l'horizon parfois il parait si sombre...
Je m’éveille ce matin, ma vie je la reprend en main. J'ai fais le tri et tué mes démons. Certes tout n'est pas totalement réglé mais je crois en l'avenir d'un jour meilleur. Je crois aux Arachnéas. Chacun d'eux par leurs magie caché au plus profond d'eux fera naitre ce jour.
[...] *Les jours passent, les nuits les accompagnent. Le temps file, mon existence a prit une tournure plutôt inattendue ses derniers mois. Je m'éveille moins la nuit, les mauvais rêves s'estompent.
Ce soir la lune est pleine, j'ai l'impression de pouvoir la toucher du bout des doigts... Adossée contre le chêne centenaire, prêt du lac, je me surprend à lui parler de nouveau, à chercher peut être sa bénédiction sur le chemin que j'emprunte... Quoi qu'il en soit j'aime me mettre dans ma bulle et juste la contempler.
l'Angaérie, je n'y pense plus avec crainte maintenant, un léger sourire se dessine sur mes lèvres même. Je revois encore mon Anna, lui tenir tête, me sauver au risque de sa propre vie. Mon Anna, mon petit supplément d'âme à moi...
J'ai suivi toutes ses directives, trempée mes lames dans le sang bien plus que je ne l'aurais fait surement si elle n'avait pas guidé mon bras. Mais la rébellion approche, je ne veux plus qu'elle me contrôle, j'ai assez joué les marionnettes. Je veux ressentir de nouveau... Oh je me passerais volontiers de la peur ou même de la haine, mais j'ai envie de nouveau de ressentir l'amour...
J'ai essayé de bien des façon de le ressentir de nouveau, certains guerriers m'ont aimé sans que je puisse les aimer en retour. Mais aujourd'hui je me dis que ce temps est révolu, je veux plus.
Alors l'Angaérie va surement s'interposer le jour où cela m'arrivera, mais je ne suis plus aussi faible qu'a l'époque et je compte bien récupérer mon cœur, trouver l'homme qui saura en prendre soins et agir de nouveau par moi même.
Je me lève et sors ma dague de son fourreau, les runes sur la lame s'illuminent au contact des rayons de l'astre lunaire. J'entaille ma main, et laisse mon sang couler dans l'eau lentement, toujours mon sourire aux lèvres.
Je regarde ma protectrice, laisse sa lumière réchauffer ma peau alors qu'une brise effleure les feuillages des arbres de la forêt qui m'entoure et me fait frissonner. C'est une promesse que je fais, mes lèvres bougent sans qu'aucun son ne s'en échappe.
Je serre mon poing, range ma dague et plonge ma main dans son reflet agité au milieu de l'eau. Il est temps de rentrer, une hydromel bien fraiche et mon lit confortable m'attendent... Sur le chemin du retour, je me sens plus légère, ce poids sur mes épaules depuis si longtemps s'estompe... Il est grand temps de commencer une nouvelle vie...*
