Brèves d'un bipolaire.

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Il y a 13 ans | Le 12 May 2010 00:47:46
J’observe les flammes qui dansent dans l’âtre de mon salon personnel à la Nécropole HôSTiLe, j’aime regarder le feu, cela me calme et m’aide à réfléchir. Surement une histoire d’origine démoniaque et chaotique. J’ai ce soir, grand besoin de réfléchir, réfléchir à ce que je viens de faire et à ce que je vais faire par la suite. Après tout, je viens d’abandonner ma fille dans le Keytek à la suite d’une lourde décision, pendant des semaines je me suis affairé à peser le pour et le contre concernant son éducation avant de la faire apparaitre du Néant. J’ai du alors trancher en faveur de son abandon dans cette forêt, figurant dans le domaine des Ombrae, protégée par des filandres d’ombre qui la laisseront sortir en temps voulu.

Pourquoi abandonner ma propre fille me demanderont certains. Pour moi ce choix est clair et sans appel. La cité HôSTiLe renferme les pires mœurs de ce monde perpétrées par des mortels : alcoolisme à l’extrême, orgies, consommations accrues de fioles emplies d’alchimie, quasi esclavagismes des femmes pour effectuer des pratiques bien plus douteuses que le nettoyage et la cuisine … et j’en passe. Je refuse que ma fille serve aux lubies de mes compères. Evidement, je sais très bien qu’une grosse partie de cette bande aura du respect à l’égard de cette enfant, tout simplement parce qu’elle est mienne, mais je n’ai pas encore assez d’influence auprès de cette engeance au complet pour garantir la sécurité totale de ma fille.

Je me masse un peu les sinus et enlève mon large chapeau noir qui cache habituellement une importante partie de mon visage. J’étais debout jusqu’à présent, debout derrière l’un de mes deux fauteuils en cuir en face de la cheminée. Ces deux fauteuils, très confortable soit dit en passant, je les avais placés légèrement en diagonales l’un par rapport à l’autre, pour que, lors de longues discussions, chacun puisse être face à l’autre sans devoir se courber et se faire mal au cou – rien de plus gênant qu’un torticolis – mais aussi sans avoir un seul côté de son corps qui se réchauffe. Je sais c'est un détail auquel personne ne prêtera attention, mais que voulez vous, je suis maniaque.

Dés mon arrivée dans cette assemblée meurtrière, je me suis, et c’est le mot, amusé à arpenter chaque couloir, l’un après l’autre. Surtout les moins fréquentés je dois dire, pour être ainsi à l’abri de l’agitation de cette troupe quelque peu barbare. J’avais, au bout de quelques jours, trouvé un ancien salon inoccupé, une énorme salle rattachée à une chambre et avais chargé quelques uns de nos esclaves de ranger et aménager ce couple de pièces à ma façon.

Cela fait bien deux ou trois longues décennies que j’occupe ce salon et malgré ce qui s’y passe, car il faut bien avouer que je ne déroge pas aux traditions HôSTiLes, l’on ne peut presque jamais y sentir les effluves de l’alcool dont je suis si grand consommateur et encore moins ceux de la mort … je dois surement tenir le lieu le plus propre de la Nécropole, mis à part bien sur, certains couloirs. Les murs sont en roche noire, roche dont je ne connais guère la nature, avec ça et là, de larges pentacles dessinés sur la pierre. Sorts de protection en tout genre et portails vers d’autres plans. Le dernier à avoir été utilisé se trouve juste au dessus du foyer, lien vers mon stock d’âmes … oui je n’ai point trouvé de nom à ce monde, manque d’imagination et d’esthétisme mais après tout je suis le seul à en connaitre l’existence et donc n’ai pas besoin de le nommer.

Je m’assois et me calle au fond de mon siège


« Il va falloir que tu la retrouve … »

Oui, il le faudra tôt ou tard, pour parfaire la condition que je lui ai octroyée. Le Chaos et le sadisme bouillonnent encore dans ses veines et son esprit. Mais infligera-t-elle la douleur ? Inspirera-t-elle la peur ? Ou quittera-t-elle le chemin que je lui ai tracé ?

Qui sait, un bon samaritain pourrait la recueillir, la canaliser et la faire évoluer sur un chemin qui m’est contraire. Je ne peux laisser faire ça !

Je passe machinalement ma main dans mes cheveux et dépose mon couvre-chef sur la petite table en bois brut entre les deux fauteuils. Une table tachetée des auréoles de verres que je pouvais boire en une seule soirée, ou deux … en matière de boissons je ne suis pas très maniaque par contre et donc je laisse trainer mes verres ça et là.


« Il serait bien fâcheux que tu la perdes … Alk’ … »

Comment s’assurer qu’elle fera ce qui doit être fait, sans devoir bien sur me révéler à elle ? Envoyer quelqu’un en qui j’ai confiance ? Pourquoi pas, oui. Mais je suis le seul à vraiment pouvoir lui inculquer ce qui doit lui être enseigné.

Comment pourrais-je veiller sur elle sans que je sois pour autant obligé de devoir quitter les hostile ou encore, et surtout, comment l'éduquer sans être amené à me présenter à elle ?


« … »


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Il y a 13 ans | Le 29 May 2010 01:25:20
Je reviens vers cette énorme citadelle, devenue ma demeure depuis déjà quelques dizaines d’années, après une longue soirée à tuer des passants à Biceps City pour récupérer leur crânes et si possible, car je ne suis pas toujours très soigneux je l’admets, leur échine mais aussi pour extraire leur âme, ce n’est pas parce que j’ai créé ma fille que je dois abandonner mon stock, sait-on jamais que j’eus besoin de ce plan pour un autre rituel.

Si l’extraction spirituelles semble justifiée, la conservation des crânes et échines est opérée pour une raison bien moins occulte, eh oui car les boites crâniennes une fois évidées et colmatées comme il se doit font office de larges verres alors que les colonnes vertébrales font de très saillant accoudoirs pour les chaises de la grande salle commune.

Je pousse la grande grille qui délimite l’entrée du domaine, énorme grille en métal forgé qui est surement là depuis un siècle facilement … oui je confirme, cela s’entend, ça grince … doux bruit macabre qui place tout de suite l’ambiance et le ton du lieu vis-à-vis du passant égaré. Je marche dans cette longue allée de terre qui mène à la grande porte de l’antichambre de la mort, je marche au milieu d’une myriade de tombes, certaines affublées de notre Croix, des anciens membres morts au combat car on meurt rarement de vieillesses parmi nous, alors que les autres stèles sont là, éparses, placées au hasard sur des fosses commune, une pour chaque clan ayant subit notre courroux, pauvres coalitions d’hommes illuminés guidés par une envie de justice. Je ne les énoncerai pas, il y en a tellement, néanmoins je jette un œil sur ma gauche, une énorme fosse encore béante, remplie de corps mutilés, démembrés, certains déjà en train de pourrir … c’est celle d’un clan qui subsiste encore, le dernier à avoir osé s’opposer à nous. Sur le côté de cette fosse, il y a une petite pancarte qui, malgré les mois, me fait toujours autant rire, elle est écrite de la main de Gôldo : Assemblée Satinée. Il est évident qu’aucun clan ne se nomme de la sorte mais je pense que le lien est très rapide à faire.

« Bon … comme tu ne sembles pas pressé … je me permets de te demander si … »


« Non … toujours pas … ce n’est pas comme je le voudrais. »

Cela faisait quelques semaines que ma deuxième facette avait repris du service en me parlant tout les soirs d’un ton arrogant, l’air de dire qu’il avait trouvé la solution lui. Je n’aime pas qu’il intervienne alors que je suis dehors, il est encore tôt, je vais avoir l’air fin à parler tout seul.

Aussi longtemps que je me souvienne, j’ai toujours eu cette petite voix dans le crâne, sorte de conscience, l’écho d’une personnalité latente. C’est un peu mon double contraire qui nourrit des idéaux auxquels je ne penserai jamais de mon propre chef, tel un certain pacifisme, une grande ouverture d’esprit accompagné d’une tendance aux longs débats … que de billevesées.

Vite, rentrons puisqu’apparemment il a envie de discuter, c’est tout de même mieux dans mon salon. Je hâte le pas sur l’allée, entre précipitamment dans la forteresse et arrive au plus vite à ma porte. Une fois dans ce salon, je pose lentement mes armes et ma … hotte pleine de crânes agrémentés de quelques épines dorsales. J’enlève mon chapeau noir, l’époussète un peu, oui c’est un des défauts de s’habiller tout en noir, la moindre petite poussière est visible comme le nez au milieu du visage mais ça reste classe n’empêche … bref ! Je pose donc le fameux couvre chef, je m’assieds et … gros blanc.

« Tu n’as plus rien à dire ? »

« J’attends que tu m’expliques ton idée … »


En fait, je n’en avais pas vraiment une, j'avais bien imaginé quelques solutions de ci de là, mais chacune reportait un nouveau problème qui n'était pas moindre à celui qui m'était déjà imposer ...
Les personnes de confiance étaient rare, il faut se le dire.

« En fait … je n’en ai pas … je viens de me rendre compte que cela ne marcherait pas »

« La solution est pourtant simple, je vais te montrer … sers moi un verre d’absinthe, pose le sur la table »


Hein ? Il perd la tête. J’avoue n’avoir jamais réussi à le faire taire complètement mais il faut aussi souligner le fait qu’il n’a jamais pu effleurer l’idée de contrôler mes mouvements. Qu’est-ce qu’encore que cette mascarade.

Je me lève pour aller quérir bouteille sur une étagère et lui verse un grand verre de cet alcool vert. Je reviens pour le poser sur la petite table et me réinstalle dans le fauteuil. J’attends quelques instants.

« Et maintenant, admire … »


Mes zygomatique se tirent légèrement contre ma volonté, dessinant un sourire sur mon visage. Ma vision se trouble et la lumière baisse peu à peu. Étrange, que veut-il donc faire là, me prouver qu’il s’est entraîner à me posséder ? Ah le petit salaud.

Au même moment, mes tempes brûlèrent de l’intérieur, comme si elles se fendaient. Deux poignards qui s’enfoncent brutalement. Je m’agrippe la tête entre mes mains, celle-ci n’est plus que douleur, comme prise dans un étau, jamais depuis des siècles je n’avais senti autant de mal en moi. Je me lève d’un coup sec et envoie valser mon fauteuil à travers la pièce dans un accès de rage, je dois reprendre autorité sur ma pensée … je tombe.



Lorsque je reprends conscience, je suis allongé, face contre la pierre … c’est froid. La douleur a disparu, je garde mes yeux clos, j’applique mes paumes sur le sol et me relève doucement.

« Apparemment tu n’as guère réussi ton coup et même si tu avais réussi cette petite manœuvre félonne. On s'était mis d'accord. Je ne dois quitter les Hôstiles et me faire connaître d'elle … Que voulais-tu montrer ? »

« Ceci … »




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Il y a 13 ans | Le 18 Jun 2010 18:25:14
Ah, me voilà enfin, celui qui hanta son esprit pendant des siècles, celui qui l’a influencé toutes ces années sans qu’il ne s’en doute une seule seconde. Je suis enfin libre de cette armature charnelle qui limitait l’étendue de mon mana, enfin libre de mes mouvements. Qu’il est bon de pouvoir tenir ce verre rempli de ce liquide à la couleur chlorophylle et bénéficiant d’une forte concentration en éthanol.

J’épanche ma soif, lentement, j’ai le temps, il ne fait rien, il ne dit rien, ahuri, abasourdi par mon apparition, je ne peux que lui donner raison dans l’absolu, je me surprends moi-même, je pensais que la tâche serai bien plus ardue que ce que j’ai affronté là. Sans doute les années ont-elles fragilisé les runes qui nous enfermaient jusqu’alors. A présent seul lui est encore sous leur emprise.

Enfin l’amertume de l’absinthe titille mes propres papilles gustatives, j’aime cette boisson depuis le premier verre qu’Alkantar a bu, même si à ce moment là je ne pouvais alors que ressentir le résidu d’une appréciation gustative répétée se terminant le plus souvent par une ivresse que j’ai fini par accepter et ce, jusqu’à me laisser voguer et tournoyer dans les méandres des états comateux de mon hôte et de moi-même.

Je l’observe, une fois le verre fini et posé sur le dessus de la cheminée, pauvre de moi ou pauvre de lui, je ne sais pas. Il attend surement que je parle à nouveau, suis-je pour lui une illusion ? Son orgueil débordant lui dicte qu’il est impossible pour lui d’avoir été dominé pas une petite parcelle de son encéphale.

Enfin il ouvre la mâchoire, mais le silence n’est pas brisé, aucun son autre que le râle de sa respiration haletante et stressée pour accompagner le rythme des secondes battues par l’énorme horloge de l’autre côté de la pièce, à l’opposée de la cheminée.

On n'est pas sorti de l’auberge à cette allure là, s’il ne daigne point réagir et faire son cinéma que j’avais malgré tout prévu, il faudra alors que je m’introduise moi-même auprès de lui sans ce préambule qui promettait d’être plus que ludique.


« L’on pourrait simplifier, rapidement, naïvement et abusivement que je suis toi. Mais, le souci demeurera puisque cela ne t’éclairera en rien. Au vu du fait que tu es, pour ainsi dire, déjà au courant.
Mais qui suis-je donc ? Ou encore que suis-je, plus précisément ? Et après tout, suis-je réel ?

Je dis après tout, mais je répondrais dans le désordre chronologique de l’énonciation des questions, pour un petit brin de mystère … on ne me refait pas Alkantar. »


Je reprends légèrement le verre en main et le fait tourner sur le marbre du dessus de l’âtre. Il se lève lentement, calmement et effectue ses manies habituelles que je connais assez bien : il ajuste sa cravate et époussette son costard.

« Suis réel donc ? Bien sur que je le suis, rien de tout ceci n’est une illusion, pas même ce verre et cet alcool qui prendra d’ici une petite demi-heure le chemin vers mes neurones et ses synapses. Tu ne rêves point, je suis bien là, devant toi. Je suis purement et simplement vivant.

Que suis-je ? C’est une question qui demande une réponse longue malgré la petitesse de la question en question … Oh, excuse moi, c’était trop tentant … elle est facile je l’admets, mais cela ne fait de mal à personne.

Je disais donc, ce que je suis. C’est complexe. Premièrement, je suis une partie de tes pensées, ton côté positif, mais ça tu l’as déjà pensé quelques heures plus tôt. Tu n’es donc pas sans savoir que nous abritons deux façons de cogiter dans le même esprit. Mais ces façons de voir les choses et les choix que nous opérons, enfin que tu opères car moi j'ai jusqu'à ce jours subit la plupart du temps, sont diamétralement opposées, si bien qu’elles sont développées chacune indépendamment de l’autre pour former deux personnes en accord sur un seul point : l’avenir de ta fille.

C’est d’ailleurs ce qui justifie mon existence, j’étais très bien dans ton enveloppe de chair même si je n’approuve qu’un nombre très restreint de tes actes, j’avais la vie belle. Mais dans mon infinie bonté, je t’apporte la solution à ce débat qui anima ton crâne pendant des semaines : j’irai quérir la trace de ta fille, je me présenterai à elle comme ton ami et comme son précepteur. Elle ne saura le vrai du vrai que plus tard.

Mais autre chose qu’une partie de ton esprit, la question en amène une autre : de quoi suis-je fait ? Né de ton esprit et vu qu’a priori il ne te manque rien … non je n’irai point vérifier ! Il me semble évident et aisé de conclure que je ne suis point fait de chair comme tu l’es présentement. Je suis un agrégat de filandres de mana, animée par une pensée, la mienne. Si j’arrive à tenir ce verre c’est parce que je condense ce flux de magie pour matérialiser des membres et apparaitre avec une silhouette humanoïde. Tu as devant toi un être fait de magie pure.

Dans cette matérialisation, je me suis plus à me créer comme une sorte de jumeau de toi-même, sauf pour la couleur des yeux et des cheveux, qui ne me plaisaient pas. »


Voilà, j’ai là terminé l’explication plus que résumée de ce que je suis et de ce qu’il doit savoir, le reste est bien trop complexe et inutile pour être expliqué à l’instant, de toute façon, sa connaissance du flux lui fera comprendre tout seul ce que je suis lorsqu’il aura repris ses esprits.

Je m’avance vers lui, me poste bien en face de sa personne, j'aperçois d'ailleurs une différence encore toute autre entre nous : les épaules, et je prononce les dernières paroles qu’il entendra de ma bouche avant plusieurs semaines.


« Et en toute fin … qui suis-je ? Je suis Howl. »

A ces mots, je m’évapore littéralement, je suis déjà sur les pas d’Elenna.