[ Musique ]
Prologue
« Ouvre les yeux, ma fille. Regarde-moi et mémorise mon visage .. Pour que plus tard tu puisses me reconnaître. »
C'était là les dernières paroles dont je me souvenais de mon passé et qui pouvaient facilement expliquer mon existence. Je n'ai jamais su quelle était l'exacte raison qui avait poussé mon créateur à m'insuffler la vie, ne m'étant jamais vraiment posé la question dans la mesure où j'avais longtemps pensé connaître la réponse. Ainsi, durant les cent premières années de ma vie, je vis mon existence conçue pour vivre le pire enfer que je n'eus jamais connu. En réalité, rien ne se déroulait pour que je puisse me donner une bonne image de l'éternité qui m'attendait. Confinée au fin fond du néant, prisonnière de l'obscurité, je ne connaissais comme sentiment que l'ennui le plus profond bien que l'idée de m'extirper de l'ombre ne me semblait pas meilleure idée que de rester cloîtrée là où j'avais inspiré la vie pour la première fois. Ce ne fut que quelques jours après que le néant se soit débarrassé de moi que je compris que je n'avais pas à avoir peur de ce monde nouveau qui m'était réservé. Ce jour là fut on ne peut plus spécial dans la mesure où je fis, pour la première fois, connaissance avec mes propres pouvoirs. Ces derniers ne se trouvaient pas être ceux d'une simple guerrière, mais avant tout probes d'une démone en qui son créateur avait mis tout son désir de chaos dans l'espoir d'en faire une descendante digne de porter son nom. J'étais, à ce moment précis, loin de connaître mon procréateur. En conséquence, mon premier véritable but consistait à savoir qui il était et, ainsi, tenter d'en apprendre plus sur moi. But qui, hélas, me semblait bien utopique en premier lieu.
Ce fut donc un matin de printemps que je vis pour la première fois celles que les sages nommaient alors Terres d'Argent. Elles n'avaient rien de bien particulier à mes yeux, si semblables à tant d'autres dont j'avais eu la chance de lire quelques légendes dans de nombreux recueils. Peuplées de barbares les plus arrogants, enfouissant ça et là quelques mages qui se battaient pour le bien des peuples ... Rien de bien original, il faut l'avouer. Et pourtant je sentais en ces lieux un pouvoir constant qui m'attirait et dont je n'avais qu'une envie, celle de le surpasser.
Je parvins ce matin-là dans une grotte qui, si mes dires s'avèrent exacts, était le passage entre le monde de l'Ombre et celui de la Lumière. Les yeux plissés à leur maximum, je tentai de me frayer un passage jusque vers la sortie qui était illuminée par le soleil éclatant du dehors. Mon coeur ne cessait de battre un peu plus vite à chaque mètre franchi, allant jusqu'à me donner de légères nausées. Je perdais alors peu à peu conscience de l'espace et du temps, ma vue se brouillant vaguement jusqu'à ne plus voir quoi que ce soit. J'atteignis tout juste l'entrée avant de m'écrouler sur le sol brûlant, inerte. Et je me remémorai :
« Je suis désolé, mais tu dois grandir comme une simple mortelle pour le moment. Sois patiente. »
Mais j'étais, à ce moment précis, certaine d'une chose : je n'étais plus la simple humaine abandonnée, et de loin. Je sentais comme quelque chose de différent en moi, une sorte d'adrénaline qui m'incitait à effectuer ce que mon créateur semblait vouloir me faire faire : entraîner le chaos sur des Terres qui, selon lui, n'avaient plus le droit de connaître la prospérité. Le pouvoir des Terres s'accroissait, mais nullement en phase avec le mien qui était bien plus rapide. Malgré tout je restai ainsi, inerte, durant huit jours avant qu'un homme ne parvienne à atteindre la grotte et ne m'emmène avec lui. Il s'appelait Howl, et allait alors se dévoiler à mes yeux comme celui qui savait et qui avait pour mission de m'inculquer ce dont je devais savoir.