Chroniques des Ombres

Membre supprimé
Il y a 14 ans | Le 21 May 2009 02:22:28
La nuit était paisible. Lentement, pour ne pas réveiller celle qui y sommeillait auprès de lui, Torrasque se leva. Il ne put toutefois s'empêcher de s'assoir un instant au rebord du lit, contemplant l'elfe, admirant, enviant peut-être un peu, sa tranquillité. Il caressa les longs cheveux rouges, déposa un baiser au creux du cou, puis se dirigea vers son bureau, alluma une bougie, sortit une plume ainsi qu'une feuille de papier.

Attente.

Les premiers mots sont, parait-il, les plus durs à écrire. Il se doutait bien que le reste s'enchainerait, comme tout s'est enchainé jusque là. Une sorte de mise au point, en quelques sortes... Enfin, il se lança, et commença de la manière suivante :


Comment introduire le récit d'une vie ?.. Un écrit long et fastidieux, qui n'intéressera peut-être qu'une minorité ?.. Je ne saurais vraiment dire. En fait, je n'attends rien de ces écrits. Je ne désire pas être lu de tous, tel n'est pas mon intérêt. Ma vie est, selon moi, une suite d'évènements inopinés qui ont abouti à ce que je suis aujourd'hui. La même chose que toute autre vie, me direz vous ? Je ne le nierai pas. Seulement, sans l'intervention d'un certain nombres de personnes dont la plupart sont désormais disparues, je serais bien loin d'être ce que je suis. Au travers de ces textes, j'espère que quiconque désirant me connaitre -si toutefois un tel désir existe- pourra être renseigné à la hauteur de ses attentes. J'espère, également et surtout, rendre un hommage à ceux qui se reconnaitront, et que je ne remercierai jamais assez...

Membre supprimé
Il y a 14 ans | Le 21 May 2009 02:49:12
Chapitre I : Jeunesse...

Je suis né il y a de cela un siècle environ, sur les terres glacées de Dusso. Je suis le fils d'Akabane et de Frayze, frère de MHD. Cependant, je ne connus de suite que ma mère, mon frère et mon père ayant quitté notre domicile peu avant ma naissance. Je ne savais d'eux que le fait qu'ils étaient des tueurs, contrairement à ma mère, soigneuse renommée, qui n'avait jamais réellement apprécié les tendances des autres hommes de la famille. C'est elle qui m'éleva, m'enseignant les rudiments de la magie blanche, comment aider mon prochain, et me faire respecter. Ma croissance s'accompagna d'une soif de connaissance inextinguible que Frayze arrivait de moins en moins à combler, et c'est dans cette optique qu'un jour, elle m'emmena sur les terres de Baduk, me donnant quelques dernières directives avant de me laisser livré -plus ou moins, elle n'était jamais très loin- à moi même. Quelle grandeur pour moi, que ces terres ! Tant de monde, tant de connaissances à accumuler, tant de choses à faire !

Je passai quelques années paisibles qui me furent très profitables : je passais mes journées à discuter ça et là, aidant les plus démunis, et les soirées autour d'un feu de camp, écoutant les récits et les conseils d'anciens guerriers de ces terres. Je ne m'en rendis compte que plus tard, mais les connaissances que j'acquis à cette époque me servirent énormément plus tard, et me servent encore de nos jours, même si désormais, je suis davantage celui qui conseille les autres...

Il m'arrivait parfois de croiser ma mère, soignant ça et là même les êtres les plus hideux qu'il m'ait été donné de voir, ou bien encore mon grand père, Jah, avec lequel je passais des nuits à discuter et à jouer.

Et puis, un beau jour, car toute chose connait une fin, je croisai un homme qui m'apprit l'existence d'une guilde, me conseillant de la rejoindre. Je ne saisis pas immédiatement ses propos, mais il était question d'un échiquier étrange résidant au sein d'un château... Me disant que la solitude avait assez duré, je me mis en route, vers le château dudit Echiquier, qui m'accueillit sans aucun problème. Les personnes vivant ici étaient étranges : divisés en sections, correspondant aux différentes pièces d'un échiquier, certain incarnaient des pièces blanches, aidant tout comme moi leur prochain, ou des pièces noires, tueurs renommés. Je trouvai aisément ma place. Pièce blanche, bien évidemment, et ma volonté de répandre le bien de manière démesurée me valut la place de Fou. J'étais donc Torrasque, Fou Blanc de l'Echiquier.

Je me destinais à être l'un des plus grands mages soigneurs de ces terres. Mais c'était sans compter sur l'influence d'une pièce noire, qui bouleversa ma vie... J'ai nommé Jesskida, Folle Noire...

Membre supprimé
Il y a 14 ans | Le 23 May 2009 13:57:46
Chapitre II : Ambiguïté chromatique.

Croyez vous au destin ? Croyez vous que le chemin de chacun de nous est prédéterminé ? Personnellement, j'en doute, mais le regard que je porte désormais sur mon passé me pousse à penser le contraire.

Je m'épanouis assez vite au cœur de l'échiquier. Je connaissais la plupart des pièces, les aidais de mon possible, dispensant mes conseils à quiconque les nécessitant, me basant sur toutes les connaissances accumulées auprès des anciens. Tout se déroulait normalement, mais... Il y avait une personne que je connaissais bien peu. Une femme fugitive, sombre, s'écartant, disparaissant dès que je lui adressais la parole, sans toutefois en connaitre la raison.

Il s'agissait de Jesskida, Folle Noire. Les pièces noires, je l'ai déjà dit, étaient des tueurs, dirigées par le Roi Noir. Mais le fait était que les Fous Noirs étaient ses plus fervents serviteurs : violents, provocateurs, il ne fallait chercher aucune logique en leurs actes, si ce n'est que la violence débridée telle une marque de fabrique.

Je gardai mes distances, jusqu'au jour ou j'assistai à une scène tragique : l'amour de J., comme certains la nommaient, se suicida sous ses yeux... Et sous les miens. Prise de désespoir, elle s'enfuit. Je ne sais ce qui me prit à ce moment précis... De la pitié, de la compassion, ou... Autre chose. Le fait est que je l'ai suivie jusqu'a ce que ses jambes ne purent plus la supporter, puis la ramenai au chateau, la veillai... Peu à peu elle se rétablit. Passé ceci, nous fîmes connaissance. Elle semblait être un être solitaire, mais néanmoins fascinant.

Les jours, les mois s'écoulèrent, je l'accompagnais, la soignais, même si ses actes me paraissaient d'une cruauté abominable. Puis, arrive un jour, le jour...

Je n'épiloguerai pas sur les détails, le récit serait trop long. Le fait à retenir est que... Jesskida se trouvait en difficulté. Et, pour la protéger... J'ai utilisé ma magie pour tuer un innocent. Dès lors, je ne fus plus le même. Le regard de cet homme me hantait la nuit, j'avais l'impression de ne plus être moi même. Ceci dura jusqu'a une nuit décisive, un échange avec Jesskida, qui aboutit sur deux révélations majeures :

D'une part, je n'avais pas tué uniquement pour la protéger. Quelque chose au fond de moi m'avais poussé à le faire, et j'y trouvais du plaisir. J'étais à jamais détourné de la voie du bien, des pièces blanches. C'est alors que je pris l'appellation sous laquelle je me suis fait connaitre : de Fou Blanc, je devins le Fou Noir...

Et, d'autre part... J'étais éperdument amoureux de Jesskida. Désormais, nous allions œuvrer ensembles, pour le meilleur, et surtout pour le pire...des autres.

Et c'est ainsi que nous avons vécu, des années durant. Je me fiancai à Jesskida, nous tuions en duo tous ceux qui croisaient notre chemin. C'est à partir de cette période que mon nom commença a être connu, voire redouté. Ma tête était mise à prix (dont l'une des annonces provenait des Metempsycoses : quelle ironie, lorsqu'on pense que je suis désormais l'und es leurs...), je déclenchais des guerres, on me traquait, mais peu importe : l'échiquier était uni, et personne ne pouvait nous atteindre.

Ou presque.

Membre supprimé
Il y a 14 ans | Le 25 May 2009 12:19:42
Chapitre III : Descente

L'apocalypse annoncée. Telle est la chose qui vint un jour bouleverser ma vie. Les dieux l'annoncèrent par des signes évocateurs. La fin de toute vie.

L'horreur à laquelle il m'a été donné d'assister par la suite ne saurait porter de nom. Les hommes, pris de folies, détruisaient toute possession avant de s'anéantir. Nombre d'actes insensés furent commis, et bien peu s'en relevèrent. L'échiquier, pour sa part, tirait à sa fin, et nous avons joué nos dernières parties avec l'énergie du désespoir. Jesskida émit quant à elle le désir de mettre fin à ses jours.

Pour ma part, je ne sais ce qui me prit à cette époque. Je plongeai dans un désespoir profond, dont je ne pensais jamais me relever. Une nuit, je quittai le chateau pour rejoindre les sommets glacés de Dusso, et je m'endormis profondément, me laissant progressivement m'éteindre en un cercueil de glace.

C'est ainsi que je suis mort.

Certains pensent que cette sensation est douce. D'autres pensent au néant. Les êtres dotés de foi croient en un jugement dernier, attestant que les dignes connaissent plaisir, les autres la souffrance. Je ne pourrai moi même répondre à cette grande interrogation, pour la simple et bonne raison que mon esprit ne fut pas libéré.

On raconte que l'esprit des lâches, tournant le dos au combat, est condamné à errer indéfiniment. Je ne me considérais pas comme tel, mais c'est bel et bien ce qui m'arriva : je fus condamné à errer sous forme de spectre, méditant à mes erreurs et à ma folie. Je pris conscience que sans un corps mon influence n'était que limitée, et que je me devais d'en récupérer un.

De longues années s'écoulèrent, années d'errance ayant pour seul but de glaner quelques âmes pouvant peut-être être échangées pour ma rédemption. Personne ne pouvait m'atteindre, mais j'étais également plus que faible. L'espoir diminuait de jour en jour...

Inconsciemment, j'avais lancé un appel à l'aide. Et quelqu'un y répondit. Quelqu'un qui allait définitivement modifier ma perception du monde. Quelqu'un qui allait changer ma vie, et me révéler ma vraie nature.

Mon frère...

Membre supprimé
Il y a 14 ans | Le 25 May 2009 13:20:43
Chapitre IV : Rédemption Ténébreuse

Je m'apprête à aborder un passage important de ma vie. J'irais même jusqu'à dire, la clé de voute. Il y eut un avant et un après cela...

Jusque là, je n'avais guère connu les hommes de ma famille, et c'est toujours le cas en ce qui concerne mon père. Je sais seulement qu'il sommeille paisiblement, quelque part sur Dusso, s'éveillant parfois, intemporel. Mon frère, quant à lui, fit son entrée dans ma vie à ma mort... Ou plutôt, à ma résurrection.

MHD pénétra dans la caverne, et brisa d'un puissant coup d'épée l'épaisse couche de glace recouvrant mon corps. Je ne saurais dire quel rituel il accomplit avec précision, mais ce qui en résulta fut la réintégration de mon âme au sein de mon corps. Je pus constater également qu'un tatouage avait fait mon apparition sur mon épaule... Un dragon noir.

C'est lorsque que je lui demandai ce qui était en train de se passer qu'il entama un long récit, sur notre communauté, et sur le pouvoir qui s'y transmettait. Sur mon passé, également.

En fait, les racines de notre famille se perd dans les méandres du temps, et le membre le plus ancien connu était Jah, mon grand père. Toutefois, nous présentions tous une particularité commune. L'aptitude à maitriser les énergies ténébreuses, de les plier à notre volonté. Trop souvent, les disciplines qui y sont liées, telles la nécromancie et l'invocation, sont diabolisées par les pouvoirs religieux, de crainte de leur puissance peut-être. Notre famille quant à elle, se contentait d'user ce don selon notre bon vouloir.

En signe d'appartenance à notre caste, nous possédons chacun en nous l'esprit d'une créature mystique ténébreuse, que nous pouvons invoquer à loisir. Concenant mon père, l'Aigle, mon frère, le Phoenix, et moi, le dragon... Ces animaux prirent une importance toute autre dans ma vie, à une époque ultérieure.

J'appris également que notre père s'opposait farouchement à ces pratiques, les estimant dangereuses. Elle n'avait pas tort, en soit, mais que peut-on y faire ? Mon père et mon frère estimaient que nous nous devions d'utiliser ce don afin d'accroitre notre puissance. Peut-être est-ce même la raison de leur départ, peu avant ma naissance ? Je ne saurais dire. Par contre, je puis désormais assurer qu'en m'enseignant la magie blanche, ma mère avait apposé en moi un sceau me protégeant de l'influence des Ombres. Celui ci avait commencé à se craqueler lorsque je me suis adonné au meurtre, pour voler en éclat à mon retour à la vie...

Tellement de choses apprises en si peu de temps... Et j'étais encore loin du compte. Mon frère m'enseigna le maniement des armes, m'apprit à manipuler une lame avec autant voire plus de ferveur qu'un guerrier, et l'art de manipuler les ténèbres à mes propres fins. Contrairement à lui se reposant sur son phoenix en tant que soutien, je présentai une aptitude naturelle à manipuler les flux d'Ombre en moi pour optimiser mes performances physiques. Je me trouvai ainsi doté du don d'ubiquité, ainsi que d'une célérité dépassant de loin celle de toute créature humaine. Ainsi que de l'immortalité...

La mort m'avait séparé de Jesskida. Je n'avais plus aucune attache autre que les liens avec mon frère...

L'Echiquier n'était plus.

Mais le Fou Noir revint, plus fort que jamais.