Le départ de Kuku

Schtrow
Fanatiques Poussiéreux


Déconnecté
 Message
Posts : 82
Threads : 14
Il y a 15 ans | Le 16 Oct 2008 23:05:00
Missive de Kuku

C'est le petit jour, mais le Freakazoïd parcourt déjà la plaine que ne remplit qu'une brume rase qui masque le sol de sa présence duveteuse, comme du coton.

A grands pas, il avance. A grands pas, il se rapproche.

Il sait.
Il a été appelé.
Il est le seul, le premier et le dernier.

Un explorateur solitaire.


Et si ... et s'il ne rentrait pas, finalement? Il avait trouvé une vie ici. Il avait une femme qu'il ... ils donnaient un nom à cette sensation de chaleur, à ce picotement dans le ventre lorsqu'elle était loin. Il était tombé amoureux, sans même se faire mal. Cela ne lui était jamais arrivé dans sa longue vie, pourtant bien remplie.

Un bourdonnement emplit son oreille, l'heure approche dangereusement. Il n'a plus beaucoup de temps avant ... avant quoi, d'ailleurs? Il ne peut le dire. Son instinct lui dit qu'il se passera quelque chose, mais sa mémoire lui fait soudain défaut. Comme s'il se trouve devant un troublant mur, gris et ennuyeux.

Ses pieds volent dans leur danse pour éviter le choc avec le sol. «Courir» avait-il appris. Sa tête fourmillent d'informations, le flot continu et désordonné l'emporte de la réalité et il chancèle par moment. Il se bat et lève les bras à l'horizontale, les mains ouvertes vers les sol. Il vrombit et accélère encore. Il se rapproche.

Enfin, l'auberge est en vue. Une flèche opaline plane au dessus, il n'y a donc aucune erreur, c'est ici qu'elle réside. Ouvrant silencieusement les gonds, il franchit le seuil avant de remettre la porte en place. Ce n'est qu'enfin qu'il pousse la porte et la claque violemment. Il n'avait jamais compris l'intérêt de cette coutume locale, cependant il la respectait de son mieux. Le tenancier de l'endroit, l'œil noir d'être dérangé pendant qu'il profitait du départ du dernier poivrot assoupi pour montrer quelques recettes à la jeune servante grommèle vers l'être étrange qui l'envahit si tôt et si mal.


Une bière, tavernier ! Et la porte de la chambre de dame Schtrow ... enfin où je peux la trouver, s'empresse-t-il d'ajouter avec un grand sourire qui met encore plus mal à l'aise l'homme. La porte, je saurais la prendre tout seul, brave homme.

Une chope de gueuse glisse sur le comptoir et Kuku déguste la mousse abondante avec un plaisir non dissimulé. Puis il renverse le liquide ambré dans la poussière du plancher et plonge sa main dans sa poche. L'air interdit du tavernier s'allonge encore lorsqu'il produit une fine poudre blanche aux reflets dorés.

Je n'ai plus de sel, il faudra vous contenter de sucre, j'ai bien peur !

Aussitôt dit, le pyjama écarlate se dirige vers les chambres, ses enjambées immenses curieusement silencieuses. Il s'approche de la porte où son instinct lui souffle que son épouse s'est endormie. Et en effet, elle y est : ses cheveux s'étalent en corole sur l'oreiller, sa frimousse enfouie sous la couette remontée jusqu'au nez. Elle est admirable lorsqu'elle dort comme un bébé. Il vient chercher sa main et pose un baiser sur la paume qui se replie, un petit peu.

Merci pour m'avoir donné la vie, Schtrow. C'est le plus beau cadeau que l'on m'ait fait...

Un cercle lumineux entoure le plat de ses chaussettes, remontant lentement jusqu'au sommet de son crâne. A la fin, Kuku avait disparu, ne laissant qu'une forme de cœur qui palpite dans le creux de la main.

Schtrow
Fanatiques Poussiéreux


Déconnecté
 Message
Posts : 82
Threads : 14
Il y a 15 ans | Le 16 Oct 2008 23:05:59
Schtrow se réveilla au petit matin. Elle avait rêvé, de son époux, Kuku, le plus doux qu'elle eut rencontré.

Elle s'était réveille, une douce chaleur dans la paume, une douce mélancolie dans le cœur. Et un sentiment d'absence qui commençait à l'envahir.

Petit à petit, pas à pas, cette sensation rongeait du terrain.

Elle ouvrit sa main, qu'elle gardait fermée depuis maintenant quelques heures. La chaleur persistait, une lumière qui semblait venir de sa paume dansait et illuminait le visage de Schtrow.

Un sourire s'esquissa sur les lèvres de la jeune femme. Elle savait ce que ce cœur étincelant voulait dire. Elle savait également que Kuku, lui qui avait été séduit par son sourire, ne resterait pas en paix si il partait, la laissant les larmes aux yeux.

Elle prit donc son courage, gardant le cœur chatoyant près de sa poitrine, et continua de vivre, de rire, de sourire.

Elle continua d'aimer sa famille, ses amis.

Elle resterait Schtrow.

La moitié de son coeur était partie avec son époux. Pour l'aider à vivre, il lui avait donné la moitié du sien. Un coeur pour deux, deux coeurs pour un.

Et tant de souvenirs, d'amour et de plaisir...